Un jour de juin 1996, sur une piste orange du Bénin, la ferrite couleur de toutes les pistes africaines, la ligne orange chaotique sabrant le vert intense de la végétation, passant devant une école ou je vois les enfants sagement alignés dans la cour de récréation, je demande soudain à la voiture ou je me trouvais de s’arrêter.
Je me retrouve devant le professeur principal, dans son petit bureau poussiéreux, au milieu de la brousse, et je ne saurais expliquer ni l’audace ni le toupet qui me permette de m’arrêter ainsi, et parfait inconnu bardé de ses appareils, de demander à pouvoir photographier les classes.
Je préfère ne pas m’imaginer la réaction d’un proviseur français à cette même demande que lui ferait un photographe africain en vadrouille….
Quoi qu’il en soit, il accepte gentiment de me laisser rentrer dans les classes, et les instituteurs m’accueillent gentiment, et fièrement.
A cette période, j’utilisais fréquemment le Polaroid, maintenant disparu, comme image définitive.
Ce qui me permettait de laisser la photo en remerciement. Et aussi de photographier avec un appareil modeste.
Je ne sais lequel d’entre nous était le plus ému. Ces enfants interloqués par cette visite impromptue, ou moi, de ces regards d’icônes.
Cette photo, si émouvante, je l’ai donc laissé dans la classe. Et elle est rentrée dans mon histoire.